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Quelle joie de retrouver la jeune virtuose des lettres italiennes (j’assume l’emploi du mot virtuose, vraiment) après avoir tant vibré auprès des 2 adolescentes protagonistes du roman D’acier !  

Marina Bellezza est de la même trempe : tout aussi acerbe sur le mal-être de la société italienne berlusconienne, tout aussi implacable sur ses personnages, excessifs, imparfaits et touchants, incarnations d’une jeunesse italienne en berne, à l’image de son économie, une jeunesse plombée par la crise, la perte de toutes illusions notamment sur l’élévation par le travail, éblouie par le miroir aux alouettes que représentent la téléréalité, le show biz et la quête de l‘argent facile.

Marina Bellezza est l‘héroïne de ce roman. Du talent, elle en a à revendre, reconnaissons-lui cela. La passion du chant ne la quitte pas depuis sa prime jeunesse et elle est bien déterminée à faire carrière grâce à ce don et enfin sortir de son trou perdu dans les montagnes du Piémont. Le hic c’est qu’elle est prête à tout : se fourvoyer dans les bals du coin à entonner du hit-parade devant un public qui la reluque plus qu’il ne l’écoute et surtout, participer au prochain telécrochet local pour prouver que c’est ELLE, la Cendrillon des temps modernes. Réussir est son ultime but, son obsession : toucher es étoiles, côtoyer les plus grands, prouver aux autres qu’elle est hors-norme, unique et pas seulement la fille d’une alcoolo et d’un coureur de jupons, beau parleur, père quasi absent qu’elle rêve pourtant d’épater.

Andréa, lui, est né du bon côté de la barrière : un père, notable du coin, ancien maire, une vie toute tracée et une carrière honorable à portée de mains. Oui mais le hic avec Andrea c’est qu’il aspire à reprendre la ferme familiale, devenir un berger et produire son fromage local. Le vilain petit canard de la famille dérange. Et puis, il y a Marina qu’il aime depuis ses 18 ans d’un amour fou, déraisonnable au possible, lui l’anachorète tortueux, elle la nymphette sublime qui ne vit qu’à travers le regard (et le désir) d’autrui. Elle est aussi inculte qu’il est cultivé, aussi excessive qu’il est posé et pourtant, par le miracle propre aux histoires d’amour, ils s’aiment passionnément.

Marina Bellezza c’est cette histoire d’amour vouée à l’échec ou comment ces 2 destins sont entrés en collision par le jeu du hasard. C’est aussi un très beau roman sur les illusions perdues, la poursuite de ses rêves, même les plus fous.

J’ai adoré ces 2 personnages touchants et têtes à claques : Marina qu’on a envie de pousser du haut de ses talons vertigineux, Andrea de secouer comme un cocotier en lui disant : « Mais Andrea, putain réagis ! elle se fout de ta gueule ! » Un récit cruel qui percute et interroge sur ses propres attentes. Et comme toujours avec Silvia Avallone, un 3e personnage, l’Italie, minée par la crise et le sursaut d'une partie de la jeune génération qui milite pour un retour aux sources, à une vie plus saine, en contradiction avec l’étalage de strass et de bling bling qui polluent tout espoir. 

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